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Décryptage

Les nanofibres et la nouvelle génération de pansements

Posté le par La rédaction dans Chimie et Biotech

Le rapide développement de la recherche dans le domaine des nanotechnologies a su amener son lot de progrès majeurs et de mini-révolutions. Pourtant, il reste encore un fossé entre l'engouement que les applications potentielles peuvent – légitimement – susciter et les applications actuellement « tangibles » pour tout un chacun, celles qui sont déjà ou qui se trouvent en passe d'être directement ou indirectement dans le commerce, mais qui se réduisent pour le moment à peau de chagrin.

Au nombre des applications tangibles, on retrouve par exemple l’utilisation de nanoparticules d’oxyde de cérium comme catalyseur de carburant, ou bien comme élément limitant la perméabilité de l’intestin à certains radionucléides. Plus proche de nous encore, l’émergence des pansements « liquides », favorisant la cicatrisation et agissant comme une seconde peau, est la preuve que le domaine médical est l’un des terrains de jeu les plus stimulants pour la recherche en nanotechnologie.

Nanofibres polymériques biodégradables

Ces pansements liquides s’inscrivent dans la droite lignée de l’évolution des bandages et des sutures légères, se positionnant comme d’efficaces compléments mais ne permettant pas encore de remplacer les points traditionnels, lorsqu’il est nécessaire de recoudre une plaie plus ou moins profonde, qu’elle soit due à une intervention chirurgicale ou en solution d’appoint sur une blessure.

Les chercheurs se sont rapidement orientés vers l’utilisation de nanofibres de polymère, d’abord sous la forme d’une pâte collante puis sous la forme d’une couche plus ou moins épaisse et biodégradable, à appliquer localement sur une incision immédiatement après l’intervention ou sur une blessure, afin de sceller la plaie tout en favorisant la guérison.

Pour autant, les moyens utilisés jusqu’à présent pour l’application de cette couche sont complexes, et ne seraient pas ou peu compatibles avec le bon fonctionnement de nos cellules et de nos tissus biologiques.

Pulvériser les nanofibres à l’aide d’un aérographe

Une équipe de chercheurs de l’université du Maryland (College Park) aurait résolu ce problème de manière peu orthodoxe, en parvenant à pulvériser les nanofibres polymériques directement sur les tissus, à l’aide d’un aérographe sorti tout droit… d’une quincaillerie. Pour les néophytes et les bricoleurs du dimanche, un aérographe est un pistolet à peinture de la taille d’un stylo permettant de peindre une surface sans contact avec celle-ci, grâce à un compresseur ou à une bombe d’air comprimé.

Implants biodégradables et matrice de soutien

Ces nanofibres polymériques auraient montré un fabuleux potentiel, non seulement dans le domaine chirurgical, mais elles constitueraient également le matériau idéal pour créer des implants biodégradables permettant de libérer des molécules et substances médicamenteuses, assurant une diffusion régulière sans nécessiter d’intervention supplémentaire pour s’en débarrasser.

Elles pourraient enfin avoir un rôle à jouer en ingénierie tissulaire, servant de matrice de soutien lors de la création de substituts de tissus fonctionnels avant d’être implantés, ou stimulant la régénération de tissus déficients.

Le filage électrostatique ou « electrospinning »

La fabrication des nanofibres nécessite le recours à un procédé complexe, le filage électrostatique ou « electrospinning » – une technique consistant à dissoudre un polymère dans un solvant à concentration donnée et à introduire cette solution dans un champ électrique intense via une aiguille métallique, d’après N. Khenoussi, de l’université de Mulhouse. Ce procédé ne serait pas sans conséquence et abîmerait très sérieusement les cellules vivantes si les nanofibres étaient fabriquées in situ. C’est en imaginant un moyen de créer ce matériau directement sur le tissu que Peter Kofinas, bio-ingénieur américain ayant dirigé l’équipe universitaire, a pensé à utiliser un aérographe.

« Utiliser un aérographe pour appliquer des bio-matériaux directement sur les tissus est une perspective alléchante », s’enthousiasme même Jeffrey M. Karp, une sommité de l’université de Harvard et du Massachusetts Institute of Technology (MIT).

PLGA et acétone

Une fois arrêté le choix de Kofinas sur un polymère dérivé des acides lactiques et glycoliques (PLGA), l’équipe de chercheurs s’est échinée à concocter une préparation compatible avec l’aérographe, influant sur le poids moléculaire du polymère et sur la concentration en acétone (le solvant) pour aboutir à la production d’une fibre d’environ 370 nanomètres de diamètre. L’acétone aurait, selon Kofinas, la bonne idée de s’évaporer avant d’atteindre la peau, suggérant donc qu’il n’y aurait plus de problème de toxicité à craindre. Les nanofibres testées ont permis de refermer des entailles sur un poumon, le foie et l’intestin d’un cochon. Leur biodégradation serait complète sur une période de quarante-deux jours.

Par Rahman Moonzur

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