L’éco-conception s’appuie généralement sur trois grandes étapes successives que sont :
- Une évaluation environnementale préliminaire du produit ou service de référence. Ce dernier se matérialise par le système que vous voudrez améliorer ou bien par les alternatives concurrentes. Cette première étape vous fournira un état des lieux de la performance environnementale de ces systèmes et vous permettra de définir vos objectifs de réduction des impacts environnementaux.
- Le développement d’une solution éco-innovante. Cette deuxième étape s’appuie sur différents outils et méthodes d’aide à la conception et peut également faire l’objet d’évaluations environnementales.
- La capitalisation des connaissances acquises lors du processus de conception. Ces informations seront réutilisées lors des itérations ultérieures et alimentent les outils d’aide à la conception.
Ces trois étapes sont donc instrumentées par deux grandes familles d’outils et méthodes, respectivement des outils d’évaluations environnementales plus ou moins détaillées et des outils d’aide à la conception beaucoup plus pragmatiques. Une troisième famille émerge également et regroupe les outils permettant de hiérarchiser les priorités de développement. Vous les identifierez parfois sous le terme d’outils de management.
Évaluez la performance environnementale
Avant de se lancer dans le développement d’une solution éco-conçue, vous serez amené à vous questionner sur la performance environnementale de votre produit. Cette première étape vous permettra d’une part d’améliorer vos connaissances sur votre produit et d’autre part d’obtenir un profil environnemental de votre système sur l’ensemble de son cycle de vie. Vous pourrez réitérer ce type d’analyse au cours du cycle de développement pour mesurer en temps réel l’empreinte de votre système. Vous validerez également vos choix de conception et alimenterez vos outils d’aide à la conception.
Acquérir des connaissances produit : la dissection produit
Ce que l’on nomme dissection produit se traduit par un désassemblage systématique du produit dont on veut améliorer la performance environnementale. Pour ce faire, le produit est démonté, chaque pièce est pesée et caractérisée. Vous devrez en effet dans la mesure du possible déterminer le type de matériaux utilisé ainsi que le procédé de transformation qui a été mis en jeu. Dans le cadre d’éco-conception focalisant sur la gestion de fin de vie, il est très intéressant de mesurer le temps de démontage, d’identifier les outils utilisés, de caractériser les liaisons d’assemblage. Le résultat d’une telle dissection est une architecture éclatée du produit agencée en fonction de l’accessibilité aux sous-systèmes et aux pièces constitutives.
Dans le cas de produit complexes, comportant un grand nombre de pièces ou encore virtuels, cette étape peut être réalisée à partir de la nomenclature produit, de simulations 3D et de dires d’experts.
L’analyse de cycle de vie complète ou simplifiée (série ISO 14040 et 14044)
L’analyse de cycle de vie (ACV) constitue aujourd’hui l’approche la plus complète et la plus robuste d’évaluation environnementale de système, qu’il s’agisse d’un produit, d’un service ou d’un procédé.
L’ACV est une méthodologie d’évaluation itérative, multicritères, systémique et globale. Basée sur des bilans massiques et énergétiques sur l’ensemble du cycle de vie, cette approche fournit une cartographie détaillée des flux de matières transitant par un système. Cette évaluation normalise ses résultats par rapport à la réalisation de la fonction du système. C’est ce que l’on nomme l’unité fonctionnelle.
Sa réalisation vous fournira :
- un inventaire des consommations et émissions générées au cours du cycle de vie (ICV) ;
- une évaluation environnementale multicritères (multiphases et multi-impacts) ;
- une identification de la (ou des) phase(s) de cycle la (les) plus impactante(s) ;
- un suivi des flux transitant par le système et donc l’identification des processus réellement contributeurs à l’impact environnemental.
Son utilisation est fortement préconisée lors des premières itérations d’éco-conception, notamment pour garantir l’obtention d’un profil environnemental complet et quantifié du système à éco-concevoir.
Cependant, cette approche est souvent consommatrice de ressources et requiert une expertise certaine tant pour mener l’analyse que pour comprendre et utiliser les résultats.
Les diagrammes de flux
Les diagrammes de flux sont également de bons outils d’évaluation quantifiée de la performance environnementale. Ils focalisent en général sur les flux de matières, d’énergie et de quelques substances particulières tel que le CO2 par exemple. D’autre part, leur implémentation n’est pas systématiquement réalisée sur l’ensemble du cycle de vie du produit. En revanche, ces approches systémiques peuvent facilement alimenter une ACV.
Parmi ces outils, vous trouverez :
- les bilans matières et énergie qui comptabilisent les consommations et émissions liées à un ou plusieurs processus ;
- les bilans carbone qui focalisent sur les émissions de CO2 et de gaz à effet de serre ;
- l’approche MIPS (Materials Intensity per Service) qui s’apparente grandement à l’ACV notamment par l’introduction d’une unité de service rendue par le système. Elle en diffère cependant par la réduction du périmètre d’étude aux flux entrants uniquement.
Ces approches quantitatives sont également consommatrices de ressources. L’ensemble des processus doit être cartographié et tous les flux doivent être quantifiés et caractérisés. L’évaluation ne fait pas intervenir de catégories d’impacts environnementaux, cependant le niveau d’expertise et de connaissance requis est relativement élevé.
Les outils d’évaluations simplifiées du cycle de vie
Pour pallier les difficultés de mise en œuvre liées à la réalisation d’une ACV ou de diagrammes de flux, vous pourrez réaliser des évaluations de cycle de vie simplifiées. Celles-ci sont menées sur l’ensemble du cycle de vie. Elles sont alimentées par des données plus qualitatives souvent détenues en interne. Le coût et le temps de réalisation en sont considérablement réduits. Elles fournissent une évaluation environnementale perçue et semi-quantitative du système sur l’ensemble des cinq phases de cycle de vie : extraction et préparation des matières premières, production, distribution, utilisation et gestion de la fin de vie. Vous pourrez utiliser les outils suivants :
- la Matrice MET (Matériaux, Énergie, Toxicité) ;
- la matrice écologique ;
- les check-lists ;
- l’ESQCV.
La matrice MET ne focalise que sur trois aspects environnementaux que sont l’intensité de consommation des matériaux, la consommation énergétique mise en jeu et enfin la toxicité. Les aspects contributeurs à ces trois indicateurs sont répertoriés dans la matrice et localisés dans les phases de cycle de vie.
La matrice écologique, quant à elle, permet d’introduire des indicateurs supplémentaires jugés pertinents pour l’évaluation. Il peut s’agir par exemple du taux de matière recyclée employée, du taux de matériaux recyclables, du taux de recyclabilité, d'une mesure de bruit, d'une amélioration de la maintenance…
Les check-lists contiennent des listes de points à vérifier pour évaluer la performance environnementale de votre système. Il peut s’agir de :
- l’emploi de matériaux recyclés ;
- l’emploi de matériaux recyclables ;
- l’utilisation de substances dangereuses ;
- le risque technologique ;
- l’utilité ;
- d’autres nuisances telles que le bruit ou les odeurs.
Chacun de ces aspects est en général noté sur une échelle qualitative caractérisant les éventuelles pénalités liées à la conception. Cette évaluation présente l’avantage de pouvoir être réalisée à partir des indicateurs propres à votre entreprise. Vous en fixez les échelles de maturité et pouvez les faire évoluer en fonction de vos progrès.
L’ESQCV ou Évaluation simplifiée qualitative du cycle de vie est très proche de la matrice écologique. La différence majeure se situe au niveau de l’échelle qualitative utilisée pour évaluer le système : défavorable, favorable, très favorable, absence de données et sans objet. Cette approche présente l’avantage de hiérarchiser les réponses en identifiant notamment les zones de méconnaissances. Couplée à un outil de management, les résultats faciliteront la hiérarchisation de vos priorités et l’établissement des actions à réaliser.
L’ensemble de ces outils est relativement facile à mettre en œuvre. Ils font certes appel à des connaissances et de l’expertise, cependant ces dernières sont généralement disponibles au sein de votre entreprise.